Live From The Field


66 rue Laugier 75017 PARIS

Le Président
Sammy GHOZLAN 
01 77 38 49 44

 Pourquoi l'Occident démocratique perdra la guerre

Shmuel Trigano
Prof. émérite des Universités



Le récent conflit à Gaza, loin d'être clos, pourrait bien augurer d'un nouveau type de guerre
adéquate à l'époque: la guerre postmoderne. Elle oppose un Etat normatif, à un ennemi qui
n'a pas de visage, à un Etat qui ne fonctionne en rien comme un Etat mais qui dispose pourtant
d'un territoire: un mouvement terroriste territorialisé. Ses soldats ne sont pas des soldats, la
guerre qu'ils mènent, retranchés parmi des civils, n'est pas une guerre, les lance missiles avec
lesquels ils arrosent les civils de l'Etat agressé sont protégés sous un parapluie humanitaire,
non seulement parce qu'ils sont positionnés dans des écoles, des mosquées, des hôpitaux,
mais encore parce qu'il n'y a formellement pas d'armée puisqu'il n'y a pas d'Etat. Comme la
population, sous la dictature du mouvement terroriste, est censée être civile, le pays attaqué
doit non seulement nourrir son ennemi en vivres et essence, parfois sous les tirs des
bénéficiaires eux mêmes mais aussi consentir au paiement de ce qui ressemble à une rançon
quoique à finalité “humanitaire” mais qui l'aide en vérité à renouveler son arsenal, une rançon
payée par le Qatar, avec, en sous main, le soutien de l'Iran et de la Turquie, tous très
préoccupés d'”humanitaire.”
Dans le même temps l'organisation terroriste développe une véritable fabrique de Fake news,
que d'aucuns ont appelée “Pallywood”, pour interpeller, au nom de l'humanisme, la
conscience morale de l'univers, en l'occurrence l'Occident démocratique, qu'elle cible avec
adresse en son point faible: la sensibilité exacerbée aux droits de l'homme postmoderniste.
La scène “humanitaire” est en fait le véritable théâtre d'affrontement de cette guerre:
l'opinion occidentale. Ici l'ennemi n'est même plus visé, c'est son entourage, ses alliés
traditionnels qui le sont, non par les armes mais par la manipulation mentale, par des images
écran, c'est à dire par ce qu'on appelait auparavant la propagande, de façon telle (“crime
contre l'humanité oblige!) qu'ils soient poussés à lier les mains de leur alié, l'Etat attaqué,
soudain campé en agresseur. Sous le scandale, l'Etat agressé doit alors cesser son action,
condamné de toutes parts. La morale au secours d'un mouvement terroriste! Il a fallu qu'on
annonce (sans vérification) que deux enfants sont morts dans l'attaque de la tour d'Al Jazira
et de CNN (les “intouchables!) pour que l'univers s'enflamme, jusqu'à la Corée du Nord
(aujourd'hui on sait que plusieurs étages étaient occupés par le Hamas et consacrés à la guerre
électronique).
Voici ce que fut la réception de la énième guerre de Gaza par l'Occident démocratique et ses
Media. Elle tend un miroir de son échec à venir dans les guerres qui s'annoncent et se
produisent déjà dans son pré carré.
Il est à remarquer, en effet, un indice significatif dans la réception des fake news du Hamas en
Europe et aux Etats Unis. Elles ont été relayées par des manifestants comprenant non
seulement des Palestiniens et des musulmans, vestimentairement très visibles, mais aussi
leurs alliés habituels qui frappent le pavé depuis la mort de Georges Floyd, en un mot les
nouveaux radicaux du mouvement Woke, Cancel culture, Me Two, autant de mouvements
réputés “progressistes”. J'aI pu voir ainsi un appel à manifester dans une université américaine
qui en appelait aux “Palestiniens, juifs,noirs, indigènes, Me Two, trans, homo, racialisés”…

C'est la doctrine de l'intersectionnalité, qui établit une correspondance entre toutes les
conditions supposées victimes de l'injustice, qui rend possible une telle confusion. Le
Palestinien devient ainsi la figure absolue et universelle de la victime. Il y là en fait autant
d'acteurs qui sont des minorités et qui, ensemble, font cause commune, au point de se croire
une majorité, une majorité de minorités, ou, pour les islamistes, selon Tarik Ramadan qui
définit ainsi le statut de l'islam en Europe, une “minorité” (démographique) “majoritaire” (par
ses valeurs).
Ces mouvements d'effacement (cancel), d'annulation de l'Occident, portent le ferment
d'une guerre de chacun contre tous. Le “citoyen” devient la cible de l'”homme”, au nom des
droits de ce dernier. Cette guerre-non guerre a gagné les rues, les lieux symboliques, le
discours public, les réseaux sociaux et même le langage: une guerre identitaire qui
“déconstruit” l'Occident, l'Etat et la nation au profit d'identités et de pouvoirs qui sont, eux,
sanctuarisés dans le cadre d'une confrontation allant du symbolique au policier et au militaire:
des zones de non droit au terrorisme et au “djihad d'ambiance”, sur le font intérieur ou à la
guerre classique en Afrique centrale.
Pourquoi, confronté à de telles menaces, l'Occident démocratique reste-il inerte? C'est surtout
qu'il est sous le coup d'une doctrine des droits de l'homme qui consacre l'eclipse du citoyen.
Pour comprendre comment les droits de l'homme sont devenus l'arme principale de cette
guerre, il faut tout d'abord se souvenir que le postmodernisme s'est livré depuis 30 à un travail
de démantèlement de la nation et de l'Etat. En “déconstruisant” l'Etat on a cassé l'idée qu'il y
avait un dehors et un dedans de la nation démocratique, comme l'exprime bien Rousseau, qui
statue que, face aux autres autres nations, dans l'arène internationale, la République
devient une “Puissance” et n'a plus le même type d'action. En supprimant la nation, ce partage
entre nationaux et étrangers a ébranlé en retour la distinction de l'homme et du citoyen et
son sens. Les ex-nationaux ne sont plus inscrits dans un Etat dont ils sont les citoyens
privilégiés mais deviennent interchangeables, substituables à l'infini aux “hommes” de la
planète qui sont susceptibles de pouvoir émarger aux droits des ex-citoyens de tous les pays.
L'étranger objectif ou celui, quel qu'il soit, qui se met en dehors de la collectivité émarge
aujourd'hui aux mêmes droits que le citoyen qui n'a plus d'avantage propre à la citoyenneté
conférée par la République mais sur qui pèsent encore les devoirs qu'elle implique. C'est
comme si l'homme de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen s'était retourné
contre le citoyen auquel il a été formellement lié par la Déclaration. Mais attention cet homme
n'est plus le sujet de droit universel mais le particulier, essentialisé, mythifié, incarné, sexué,
racisé, finalité pour lui même, essentialisée. Toute action de l'Etat dans cette guerre devient
ainsi passible de “crime contre l'humanité” car elle touche aux hommes et non aux citoyens
responsables de la guerre qu'ils ont déclarée au nom de l'”homme”, désormais de supposés
“civils”. La guerre n'est plus ce qu'elle était!

Une remarque: le fait qu'un tel scénario ne se produit pas quand il s'agit de voler au secours
de l'Arménie ou des assassinats de masse chrétiens en Afrique, etc, montre qu'Israël
constitue un cas à part de la guerre post moderne, indexé aux Juifs et à la recomposition de
l'antisémitisme qui caresse depuis toujours l'idée que “les Juifs tuent des enfants”. Que l'on

se souvient de l'histoire (très douteuse) de l'Enfant Al Dura, une histoire montée de toutes
pièces, qui donna à la deuxième intifada une ampleur mondiale…