Live From The Field

 

Eclipse du sionisme au sein du
pouvoir israélien?

 

Shmuel Trigano

Professeur émérite des Universités

 

Avec la coalition
au pouvoir, un observateur lointain pourrait avoir l'impression que tout roule
à nouveau et que tout est rentré dans l'ordre après la crise que l'on sait.
Mais ce serait là une illusion dont l'épreuve critique sera l'évolution des
tensions  qui lui sont inhérentes.

Le gouvernement
est, certes, légal dans la procédure qui a conduit à sa formation, mais sa
légitimité démocratique est très faible. Il est le produit d'un ensemble de
minorités qui ne se sont unies que pour exclure la majorité du pouvoir. Le
premier ministre est extrêmement faible car son autorité repose sur 7 députés.
C'est Yair Lapid, ministre des affaires étrangères et chef de Yesh Atid, le
parti qui a le plus de poids (quoique 17 sièges) qui occupe la scène, alors que
Bennett, si présent avant la formation de la coalition, révèle le profil d'un
personnage plutôt fallot. C'est, justement, et contrairement à ce que la
coalition annonce, un gouvernement de centre gauche et pas de droite, dont le
chef du principal parti annonce à l'envie qu'il poursuivra quand il sera au pouvoir
les illusions d'Oslo.

 

Mais le plus grave
est ailleurs, toujours à la Knesset, car cette coalition de bric et de broc ne se
maintient au pouvoir que parce qu'elle bénéficie d'un double système de
protection que lui procurent les deux partis arabes, des partis qui sont depuis
toujours, et déclarativement, hostiles à l'Etat d'Israël, au sionisme, adeptes zélés
du boycott et de l'accusation d'Israël dans l'arène internationale. Le parti
des Frères musulmans, d'un côté, soutient la coalition en se livrant à un
véritable chantage aux subventions, en menaçant lors de chaque vote de ne plus
soutenir la coalition qui ainsi d'effondrerait. Mais c'est sans compter, de
l'autre côté, le parti de la liste unifiée d'Amad Tibi. Lui ne soutient pas la
coalition mais dispose par contre  des
voix qui la sauveraient si d'autres voix – ne serait-ce qu'une voix – faisaient
défaut (celles des partis généralistes ou de l'autre parti ethnique arabe). La
Liste unifiée fera tout, en effet, pour éviter de voir la droite et donc
Natanyahou, revenir au pouvoir et pour maintenir le pouvoir israélien dans une
fragilité radicale: dans sa dépendance.

 

Le gouvernement
israélien est ainsi dans la main de deux partis antisionistes, soutiens du
Hamas et du Hezbollah. D'aucuns ont vu dans cet état de faits le début de la
libanisation d'Israël. Il est vrai que dans tout le Moyen Orient, sauf en
Turquie et au Katar, les Frères musulmans sont bannis du pouvoir et
pourchassés.

 

 C'est l'éclipse du sionisme qui s'annonce, dont
Lapid nous a donné une illustration il y a quelques semaines en jugeant que l'antisionisme
et l'antisémitisme qui se manifestent sur la scène internationale relevaient de
la même haine envers les Noirs, les femmes, les ex colonisés et autres BLM
alors que ce sont dans ces milieux mêmes que la haine d'israël, qui frappe d'abord
les Juifs diasporiques, est la plus répandue. Ce que ce jugement illustre c'est
tout simplement l'éclipse de la condition des Juifs comme peuple dans le cercle
politique. Je rappelle que la première caractéristique de l'antisémitisme c'est
de s'attaquer à la condition de peuple qu'il y a dans les individus juifs
(c'est ce qui est à la source du mythe du complot juif mondial et c'est pour se
libérer de cela même  que le sionisme est
né. Aujourd'hui cette condition de peuple est doublement identifiée dans le
sionisme, c'est à dire un Etat-nation juif réél. Je me demande quel Israël et
quel sionisme l'Agence juive de la coalition va pouvoir vendre aux candidats à
la alyiah… Installez vous dans un futur Liban?

 

Une question bien
plus grave que la politique politicienne est ici posée.

 

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